Le Grappilleur

Qu’est-ce que le soutirage d’un vin ? (Grappilleur n°132)

Le soutirage permet au vigneron de décanter le vin au cours de son élevage afin d’éliminer les dépôts indésirables. Cette décantation grandeur nature permet une mise au propre du vin, indispensable pour favoriser son évolution dans les meilleures conditions. Le soutirage permet de séparer le vin de ses lies.

Par cette opération capitale, l’œnologue élimine ainsi les dépôts indésirables constitués de résidus de fermentation, de tartre précipité s’accumulant au fond des barriques ou des cuves. Le contact prolongé de ces résidus avec le vin risque d’induire des déviations aromatiques, des odeurs de réduit voire d’œuf pourri appelée mercaptan, de mauvais goûts, voire de maladies. Bref, rien de bien agréable pour les amateurs de bons crus que nous sommes.

De manière concrète, le vin est transvasé de fût en fût, de cuve en cuve, par pompage, par écoulement ou par poussée d’un gaz. Pour les vins rouges de garde, le soutirage est souvent pratiqué avec une aération intermédiaire. L’opération, par de subtiles réactions chimiques, favorise la formation des arômes et la maturation des tannins, fixe la couleur, élimine l’excès de gaz carbonique résiduel et les odeurs de réduction. Le moment de soutirer est déterminer par la dégustation régulière des contenants.

La qualité et nombre de soutirages influent énormément sur la réussite de l’élevage. Les pratiques diffèrent selon les régions de production, les cépages, la couleur et la nature des vins, les millésimes et les habitudes secrètes des vignerons et œnologues. Attention de ne pas exagérer, le mieux étant l’ennemi du bien : trop de soutirages peuvent oxyder ou décharner un vin. Une exception à la règle : certains vignerons soutirent peu ou avec les lies fines afin d’enrichir la complexité aromatique de leurs vins.

Lorsque les soutirages sont réalisés de façon adéquate, c’est-à-dire quand le vin en a besoin, les effets à la dégustation sont notables et aisément reconnaissables par l’amateur averti. On obtient des vins racés, à la robe limpide et éclatante, exprimant au mieux leur terroir. Ils sont marqués par une grande pureté et un aspect cristallin tant du point de vue aromatique que gustatif.

Au nez et en bouche, l’amateur peut déceler une belle expression du fruit et de ses arômes. Les vins gagnent en matière et en complexité, sont plus francs et plus faciles d’approche. À l’inverse, si l’amateur observe une robe peu éclatante, que le nez dégage un côté réduit marqué ou un vin trop sur la réserve, il peut en être déduit que le ou les soutirages ont été mal fait ou réalisés au mauvais moment. Le soutirage est une étape capitale de l’élevage qui compte pour un tiers dans la réussite de l’élaboration des rouges et pour moitié dans celle des blancs.

Source : RVF